Souvent, quand on lit des histoires de créations d’entreprises à succès, ou d’inventions qui ont changé le monde, on a en tête la révélation. La personne qui tout d’un coup s’écrie « Eurêka ! » car elle vient de découvrir quelque chose comme par magie. On a un peu cette idée reçue que la bonne idée va arriver brutalement d’on ne sait où, dans un moment d’inspiration.
Le mythe de l’idée
En réalité, je pense que cette croyance nous entrave plus qu’autre chose. Parce que ça n’arrive jamais comme ça. Je pense que c’est un mythe total, et que dans 99,99% des cas, les trouvailles, les bonnes idées, les trucs qui fonctionnent arrivent après des jours, des mois, des années de recherches, de tentatives, d’essais ratés, ou médiocres.
Quand on nous interview sur Cybèle (notre activité de visites théâtralisées de Lyon), comme c’est quelque chose qui n’existe pas vraiment ailleurs, on nous demande souvent « Comment vous est venue l’idée ? » Comme presque personne d’autre ne fait ça, il a bien fallu qu’on l’invente. Et donc, ce que j’entends toujours derrière cette question c’est : « Quel a été le déclic, le moment où tout d’un coup vous vous êtes dit – On va faire des visites théâtralisées ! » et pof le produit était là tout cuit dans nos mains. C’est une question que je déteste parce que l’idée ne nous est pas « venue ». Il n’y a jamais eu « UNE idée ». Il y en a eu des centaines, il y a eu des essais, des tentatives, nos premières visites n’étaient pas théâtralisées, et elles étaient nulles. Elles étaient complètement perchées, on essayait de faire des visites un peu participatives alors qu’aujourd’hui on est carrément contre, bref. À partir de ces visites là, on a progressé, on a testé des choses, petit à petit, et à force, le catalogue s’est construit. On n’a jamais eu « L’IDÉE ». On a testé 1000 idées différentes.
L’idée, c’est le travail
Encore aujourd’hui, au bout de 10 ans, on teste constamment des nouvelles choses. Certaines fonctionnent, d’autres non. Quand ça fonctionne, on garde, ça améliore notre travail. Quand ça ne fonctionne pas, on essaye de comprendre pourquoi, ça améliore parfois aussi notre travail.
Ce qui est sûr, c’est qu’on n’a jamais « eu l’idée » de créer ces visites. Et si un jour on s’était dit « on va bientôt trouver LA bonne idée, c’est sûr« , je pense qu’on aurait beaucoup moins essayé de choses, on ne se serait sans doute pas laissé la place de tâtonner, douter, chercher, essayer.
Je pense aussi qu’à un moment on se serait dit « Ça y est, on a trouvé la bonne idée » et on se serait reposées sur nos lauriers. (Spoiler : ça n’aurait pas marché, on continue d’améliorer nos visites constamment !)
Alors si un jour vous entendez une histoire de quelqu’un qui a eu « LA bonne idée« , dites-vous que c’est sans doute juste du storytelling, et que la personne en question vient en réalité de passer des semaines ou des mois ou des années à essayer. Sa bonne idée, ce sont ses milliers d’heures de travail.
L’Exception
En plus de 10 ans de Cybèle, je n’ai qu’un seul souvenir de moment où la bonne idée est tombée du ciel. Ce sont les visites Cymoche (pour rappel notre boite s’appelle Cybèle).
Septembre 2020, en pleine crise du COVID, on essaye de trouver une idée pour relancer l’activité, faire quelque chose pour nous sortir du marasme. On est au bureau, on est à bout de nerfs, on raconte n’importe quoi parce qu’on est épuisées et qu’on n’en peut plus, et dans un moment de grosse marrade on dit « Bah franchement vu l’année de merde qu’on se tape on n’a qu’à faire des visites de merde, on ira visiter des lieux super moches et on appellera ça les visites Cymoche ! C’est tout ce que cette année mérite !«
Silence.
« En vrai on pourrait faire ça non ? »
Et c’est ainsi que naquirent les visites Cymoches qui ont probablement fait le plus gros buzz de l’histoire de Cybèle. MAIS il y a un mais. On n’a tellement pas l’habitude des idées tombées du ciel qu’on a quand même passé 3 jours à se dire que ça ne faisait probablement rire que nous, à envoyer des messages à des amis pour leur demander ce qu’ils et elles pensaient de l’idée.
Et après quelques confirmations, on a fini par valider les visites Cymoche.